Pendant l’automne 2011, le magazine Forward de la Fédération des Entreprises de Belgique (FEB) avait réunit pour un débat 8 acteurs du monde de la finance, et a publié dans un dossier de 9 pages leur avis sur le rôle et l’avenir du secteur bancaire. L’article commence par aborder les causes de la crise financière de 2008 et s’interroge sur l’efficacité incertaine des règles de Bâle III à empêcher une nouvelle crise en 2012, puis s’intéresse à la question de la scission entre banques de dépôt et banques d’investissement. [1]
Dès la première question du magazine : « La deuxième faillite virtuelle de Dexia en trois ans ne prouve-t-elle pas que le secteur n’est pas en mesure de s’assainir seul ? », Olivier Marquet, directeur général de la Banque Triodos Belgique [2], se démarque de ses confrères. Il rappelle que « le travail d’une banque consiste à recueillir l’épargne et à réinvestir dans l’économie cet argent dont les épargnants peuvent momentanément se passer. Elle doit également prêter aux entrepreneurs des crédits suffisants pour stimuler la dynamique économique. Dans le même temps, l’épargnant souhaite obtenir la garantie que ses économies seront protégées et assurées. Enfin, il faut protéger les banquiers contre eux-mêmes [souligné par nous], afin d’éviter qu’ils ne prennent des risques inconsidérés en vue de faire du rendement. »
Faut-il scinder les banques de dépôt des banques d’investissement ? « Pendant la crise des années 30, le président Roosevelt avait introduit le ‘Glass-Steagall Act’, qui interdisait aux banques de spéculer en Bourse avec les économies des citoyens. Il me paraît urgent que le législateur belge – sans attendre l’Europe ou les régulateurs – impose une scission entre les banques de dépôt et les banques d’investissement ou ‘banques casino’. [souligné par nous] Les deux activités doivent être distinctes, car l’épargne est une activité à forte intensité de capital, mais moins rentable, et les grandes banques auront, sinon, systématiquement recours à des produits risqués pour augmenter leur rendement. Nombre de chefs d’entreprise sont d’ailleurs favorables à une nouvelle application du ‘Glass-Steagall Act’. »
Il termine ensuite en attaquant le modèle des « too big too fail » : « Les banques doivent changer radicalement, tant en termes de dimension que de modèle d’entreprise. Les monstres internationaux sont voués à disparaître en raison de leur taille et de la montagne de règles complexes nécessaires pour tenter de les surveiller. On a besoin d’un modèle bancaire du type ‘small enough to fail’, dont la dimension contraint à une bonne gestion. »
Confirmant l’opposition de longue date de la Fédération belge du secteur financier (Febelfin) à cette alternative essentielle aux renflouements des banques et à l’austérité, son président Filip Dierckx répond que : « L’argument le plus fort en défaveur d’une scission porte sur les coûts accrus qu’une telle séparation entraînerait pour les clients, à savoir les entrepreneurs. Étant donné que le financement interne ne sera plus possible, les banques d’investissement devront payer davantage pour rassembler leur capital. »
Mais appuyant la faiblesse de cet argument, Koen Schoors, professeur d’économie à l’Université de Gand, répliqua : « D’accord, une séparation coûte de l’argent (c’est déjà le cas au sein d’une seule et même banque). Les activités risquées seront plus chères. Ce qui est une bonne chose. D’ailleurs, si j’étais une entreprise et que je devais choisir entre des coûts faibles, répartis dans le temps, ou une avalanche de coûts à cause de la crise, je n’hésiterais pas. »
Depuis 2010, une proposition de loi de scission bancaire, sur le modèle de celle qui fut d’application en Belgique entre 1934 et 1993, introduite par des députés Ecolo – Groen, dont Meyrem Almaci et Georges Gilkinet, attend toujours son adoption dans les deux chambres.
SIGNEZ L’APPEL A UN GLASS STEAGALL GLOBAL
[1] Rappelons que l’hebdomadaire financier Trends-Tendance du 22 septembre 2011 avait fait sa une sur la séparation des banques, développant ce sujet en profondeur dans un dossier de quatre pages. Et en janvier 2012, une des premières actions du gouvernement Di Rupo avait été de demander à la Banque national de Belgique (BNB) d’étudier la faisabilité « d’une distinction entre banques commerciales et banques d’investissement ». Malheureusement le rapport intermédiaire que la BNB a publié reste encore très décevant, et le législateur belge n’a toujours pas agit pour imposer cette scission bancaire.
[2] Triodos est une banque néerlandaise qui se revendique comme une banque de financement éthique et durable.
# michel49
• 05/09/2012 - 10:05
La loi anti-trust qui a mis un terme au monopole de Standard Oil serait aussi utile que Glass Steagall.
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# petite souris
• 04/09/2012 - 13:54
Certains banquiers de pays voisins parlent du Glass-Steagall act comme utile et indispensable pour résoudre la crise et le bien commun.
J’aimerai en tendre aussi un banquier français le dire !
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