Le 7 mars, le ministre israélien des Transports, Yitzhak Mordechai, a pris congé du gouvernement suite à une plainte pour harcèlement sexuel déposée contre lui par une salariée du ministère. Une enquête au criminel a été ouverte.
Mordechai était également membre du Cabinet de la sécurité et vice-premier ministre. Alors qu’il était ministre de la Défense du gouvernement précédent, il fut l’un des trois responsables de la chute de Benjamin Netanyahou, les deux autres étant le président Ezer Weizman et Ehoud Barak. Tout comme Mordechai, tous deux ont récemment fait l’objet de scandales et d’enquêtes.
Ce dernier scandale, qui marque une importante escalade dans déstabilisation du gouvernement Barak, comporte des parallèles frappants avec le Clintongate et l’affaire Lewinsky. Comme dans le cas de Clinton, les rumeurs circulent depuis des années sur le « problème » de Mordechai, mais même la plaignante s’est dit étonnée de la rapidité avec laquelle les médias se sont précipités sur l’affaire et de son retentissement. Selon le procureur, les autorités avaient promis la plus stricte confidentialité, mais en moins de vingt-quatre heures, les accusations faisaient la une des journaux et le gouvernement avait un ministre de moins. Si l’on n’a pas révélé le nom de la plaignante, les résultats de son test au détecteur de mensonges ont été remis à la presse. En Israël, on parle de « lynchage médiatique ».
En outre, la « Lewinsky israélienne » a réussi à enregistrer des conversations apparemment accablantes avec le chauffeur de Mordechai et son chef de bureau. Les similitudes ne s’arrêtent pas là. Dans le passé, Mordechai avait déjà fait l’objet d’une enquête menée par la National Fraud Unit, ouverte suite à une plainte de Hannah Ziv, l’auteur d’un livre destiné à être distribué pami les forces de défense israéliennes. Selon elle, en 1998, Mordechai, qui était à l’époque ministre de la Défense, a annulé la commande du ministère pour raisons de corruption. Tout comme l’écrivain new-yorkais Lucianne Goldberg, qui a joué l’intermédiaire entre la confidente de Lewinsky, Linda Tripp, et les médias de droite, Ziv avait une « dent » contre le « politicien macho ». En demandant l’ouverture d’une enquête au criminel, Ziv a transmis à la police des accusations de harcèlement sexuel portées contre Mordechai par des femmes qu’elle avait contactées mais qui n’ont jamais porté plainte elles-mêmes.
Il semble même qu’il y ait aussi une « Linda Tripp ». Selon la presse israélienne, une certaine Mme C., qui occupe un poste important au gouvernement, prétend aussi avoir été harcelée par Mordechai, mais elle a attendu treize ans avant de dévoiler l’incident. La police a eu recours à une procédure inhabituelle en permettant à Mme C. de parler à la plaignante pour la convaincre de porter plainte au criminel. Entre-temps, deux autres femmes ont porté plainte pour des incidents remontant à la fin des années 80.
En dernière analyse, ce dernier scandale vise lui aussi à affaiblir le soutien public aux accords de paix avec la Syrie et les Palestiniens. Mordechai, un sépharade et ancien chef d’état-major, aurait certainement pu mobiliser un large soutien en faveur de ces accords. De même pour Weizman, qui est accusé d’avoir accepté des contributions financières illégales. Tous ces scandales ont pour but de renverser le gouvernement Barak afin de torpiller le processus de paix.