Le directeur exécutif de la Banque d’Angleterre chargé des marchés, Paul Tucker, a consacré sa présentation du 11 décembre aux incertitudes qui planent sur le prix des actifs, le système financier et le macro-système. En supposant que « rien de vraiment méchant ne se produira en raison de la sagesse collective des autorités monétaires du monde », il se demanda si les marchés financiers évaluent correctement les risques liés aux prix, ou si les investisseurs croient que « les marchés de capitaux liquides parviendront à endiguer la volatilité » en cas de coup dur.
Tucker a ensuite évoqué le risque que « les marchés financiers ne tiennent pas compte, dans leurs prix, de la gamme d’incertitudes qui préoccupent le secteur officiel, et donc ne s’en protègent pas. Peut-être que le secteur officiel a tort. Ou peut-être avons-nous affaire à une sous-estimation des risques sur le marché, que l’on peut associer à la "recherche du profit" tant discutée, et possiblement aussi à un trop-plein de confiance dans la capacité des autorités monétaires ou des marchés de capitaux liquides d’adoucir les chocs. »
Ce phénomène pose trois questions que Tucker a énumérées : « Savoir si les risques vont se cristalliser. Dans l’affirmative, savoir si la cristallisation sera ordonnée ou désordonnée sur les marchés financiers. Et au cas où les marchés des actifs seraient désordonnés, si cela aura des répercussions sur le système financier de manière à sérieusement amplifier l’ajustement et à créer de graves menaces à la stabilité systémique. » La conclusion de Paul Tucker : « Je crains que l’on ne connaisse pas la réponse. »
En présentant le rapport semestriel de la Banque centrale européenne à Francfort le 11 décembre, son vice-président Lucas Papademos a repris le thème soulevé par Paul Tucker, de la Banque d’Angleterre. On a abaissé les primes de risque sur l’ensemble des marchés financiers à des niveaux extrêmement faibles, a-t-il déploré, autrement dit, on fixe les prix en fonction de conditions optimales sur le marché (pricing for perfection). Par conséquent, ces marchés sont vulnérables à des « perturbations négatives inattendues », telles une hausse du prix du pétrole, une plus forte demande de fonds extérieurs par des sociétés non financières en cas de recul des profits, ou encore une modification de l’allocation globale des actifs.
Un détonateur de ce type pourrait occasionner d’éventuelles hausses soudaines des rémunérations obligataires, des écarts et des primes de risque, aussi bien sur les marchés émergents que sur les plus traditionnels, avec pour résultat d’importantes pertes de porte-feuilles pour les banques et d’autres institutions financières. « Plus important encore, cela risquerait d’augmenter les risques de contre-partie de certaines banques vis-à-vis de hedge funds, en cas de déclenchement de faillites groupées de hedge funds. »
Le rapport de la BCE inclut cinq articles spéciaux sur ces thèmes : les risques systémiques posés par de grands groupes bancaires complexes, les contrats dérivés sur défaut, la croissance du crédit en Europe centrale et de l’Est, le risque systémique dans le secteur des assurances, un examen des plans de gestion de crise financière dans l’UE.