Le 3 février 2008 (Nouvelle Solidarité) - Le grand quotidien de référence de la Suisse romande, Le Temps, à peine une semaine après avoir interrogé Jacques Cheminade sur le projet de Nouveau Bretton Woods de Lyndon LaRouche, nous offre une piste d’enquête intéressante suggérant la présence d’une main anglaise dans la débâcle de la Société Générale.
Dans un article au titre évocateur, « Les traders ressemblent à des animaux de proie qui mangent ce qu’ils tuent », le correspondant du journal à Londres a pris soin d’interviewer Martin Baker, écrivain et ancien chroniqueur financier au International Herald Tribune (journal basé à Neuilly), sur son roman Meltdown, publié le 4 janvier chez McMillan à Londres.
Digne de la tradition perverse d’Orwell et d’Huxley, le roman est construit autour de l’histoire d’un trader français s’efforçant de dissimuler les énormes pertes accumulées lors de prises de positions risquées... L’histoire devient encore plus cocasse lorsqu’on découvre que Martin Baker est marié avec Nicola Horlick, qui, à l’age de 42 ans était la conseillère spéciale de Philippe Collas, président-directeur général de SG Asset Management (SGAM)* et directeur général adjoint du groupe Société Générale, chargé de la gestion d’actifs. Horlick était directrice générale de SG Asset Management UK, la filiale britannique de SGAM, dont elle avait été un des fondateurs en 1997... **
Le Temps : « Votre livre raconte l’histoire d’un courtier en France qui réalise d’énormes pertes et les dissimule. L’intrigue se complique ensuite sur un complot mondial pour mettre à bas le capitalisme. C’était prémonitoire... »
Martin Baker : « J’ai écrit treize versions de ce livre pendant onze ans avant de le publier. Mais ce qui est incroyable, c’est que dans la douzième version, le héros investissait via un véhicule nommé ’ Delta Quadrant ’, alors que Jérôme Kerviel investissait dans ’ Delta One ’. C’est vraiment étrange. La raison pour laquelle j’ai écrit cela est que je suspecte qu’il s’est passé quelque chose de similaire dans le système financier français il y a treize ou quatorze ans. Le chef des produits dérivés d’une large banque française, qui était révéré comme un dieu et qui était un génie des mathématiques, a un jour disparu dans un nuage de fumée. Par la suite, un communiqué de la banque annonçait qu’il avait démissionné par consentement mutuel. Je me suis dit : comment est-ce possible ? J’ai alors imaginé une histoire où d’énormes pertes avaient été dissimulées. »
Ensuite, Baker, bien au courant, s’étend sur le comportement des traders londoniens : « Ces types sont dépendants de l’adrénaline. Ils vivent en permanence survoltés, pour le marché. Comme dans un safari, ils sont à la recherche de proies à tuer. S’ils pensent que vous avez par accident sous-évalué un actif, ils l’achètent, le revendent, et mangent le profit. Ce sont des animaux de proie. Leur style de vie est incroyable. Il y a beaucoup de sexe dans mon livre, avec une scène dans un club échangiste. C’est ce que ces types font : ils vivent à coups d’adrénaline et ils utilisent des substances chimiques pour tenir. La consommation de cocaïne est énorme. A la City de Londres, il est raisonnable de dire qu’au moins la moitié des courtiers sont des utilisateurs réguliers de cocaïne. Ils aiment les alcools forts et ils aiment le sexe immédiat. Ils sont à la recherche de gratifications immédiates. Leur vie sociale reflète leur vie professionnelle : manger, tuer, avancer. »
Le Temps : « Pourquoi le scandale de la Société Générale et votre livre se passent en France ? »
Martin Baker : « Une des raisons pour lesquelles le problème est arrivé en France tient à l’hostilité qui y règne contre le capitalisme anglo-saxon. J’y décèle une arrogance intellectuelle charmante, mais injustifiée. J’aime beaucoup le système français, mais son antipathie contre le capitalisme anglo-saxon se double d’une fierté intense de ses capacités mathématiques qui remonte à des gens comme Henri Poincaré (mathématicien du XIXe siècle, ndlr). L’idée de trouver un modèle mathématique pour dompter la « bête » du capitalisme anglo-saxon est très bien accueillie. Les Français cherchent à battre le système. Et c’est ça qui les pousse à leur propre perte. »
Le Temps : « Pourquoi ? »
Baker : « Cette attitude va à l’encontre d’une conviction profondément ancrée dans le monde anglo-saxon : on ne peut pas battre le marché. Le réflexe français est de dire : si, nous le pouvons, nos meilleurs mathématiciens vont trouver une solution. C’est pour cela que les produits dérivés, dans l’esprit français, sont considérés comme quelque chose d’à part. C’est vrai que Kerviel n’était pas une star, mais il travaillait sur ces produits. »
Jacques Cheminade pense que les Britanniques essayent de profiler le cartésianisme français afin de détruire l’exception française qu’ils détestent. Il fait appel aux institutions de la présidence française et à la classe politique française pour se rendre à l’évidence que sa proposition et celle de Lyndon LaRouche pour un Nouveau Bretton Woods sont la seule voie pour sauver la France de la destruction.
Notes :
(*) La SGAM (la filiale gestion d’actifs de la banque, gestionnaire des OPCVM [Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières] distribués par la Société Générale) a connu en 2007 des retraits significatifs de fonds en France sur ces OPCVM dynamiques, fortement impactés par la crise des subprimes : - 6,3 milliards d’euros. Un document officiel de la Société Générale précise que « le groupe a décidé d’assurer la liquidité de ces fonds au profit de ces clients » bien que « l’intégration des actifs correspondants ont conduit à des pertes ou des dépréciations d’actifs ».
En claire : contrairement à Oddo Asset Management qui a d’abord suspendu et ensuite liquidé en pure perte ces trois fonds dynamiques, la Société Générale aurait repris dans ses comptes pour 6,3 milliards d’euros d’OPCVM monétaires dynamiques dont les sous-jacents sont majoritairement des titrisations de crédits qui ne valent plus rien...
(**) Comme le rapporte la Revue de Banque : « Malgré son niveau d’expertise, Nicola Horlick a quitté son poste de directrice générale de SGAM en laissant derrière elle des performances en demi-teintes et des deals perdus d’une valeur de 1,4 milliards d’euros. »
Notez également que l’administrateur de la Société Générale Robert A. Day ( milliardaire américain et conseiller d’Arnold Schwarzenegger) soupçonné de délit d’initié pour avoir vendu pour plus de 126,5 millions d’euros d’actions de la banque quelques jours avant la « méga-fraude » perpétué par le « trader fou » Jérôme Kerviel, est également le fondateur et président de la Trust Company of the West (TCW), une société de management évalué à 71 milliards d’euros basée à Los Angeles et filiale indirecte de Société Générale Asset Management.