22 octobre 2008 (Nouvelle Solidarité) – A Strasbourg, devant le Parlement européen, Nicolas Sarkozy a relaté son action en tant que président en exercice de l’UE. A propos de la crise financière internationale, il a exprimé pour la première fois le souhait que « le système monétaire soit repensé entre des taux de change fixes. »
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Après un petit historique du tsunami financier qui s’est concrétisé par la crise des subprimes, début août 2007, et des différentes tentatives des gouvernements pour juguler la crise, Sarkozy constate que « tout ceci, c’est de la gestion de crise, Monsieur le Président [du Parlement européen]. Ce n’est rien d’autre que de la gestion de crise. Ce n’est pas plus. Si on ne l’avait pas fait, qu’est-ce qui se serait passé ? »
« Mais il reste à apporter les vraies réponses. Comment tout ceci a-t-il pu être possible ? Comment éviter que tout ceci ne se reproduise ? Est-ce que l’Europe a des idées à défendre ? Une politique à proposer ? Et c’est dans ce cadre qu’au nom de l’Europe, à l’Assemblée générale des Nations unies, début septembre, j’ai proposé qu’on tienne un sommet international pour porter les bases d’un nouveau Bretton Woods, par référence à ce qui s’était passé au lendemain de la guerre mondiale, - la seconde - pour porter un nouveau système financier mondial. Cette idée progresse. Quel doit être l’objectif de l’Europe dans le cadre de ce sommet ? L’Europe doit porter l’idée d’une refondation du capitalisme mondial. Ce qui s’est passé, c’est la trahison des valeurs du capitalisme. Ce n’est pas la remise en cause de l’économie de marché. Pas de règles, la récompense de spéculateurs au détriment d’entrepreneurs… Nous devons porter l’idée d’une nouvelle régulation. L’Europe doit proposer ces idées et elle les proposera. D’abord, qu’aucune banque qui bénéficie de l’argent des Etats ne puisse travailler avec des paradis fiscaux. Qu’aucune institution financière, Monsieur le Président, ne puisse travailler sans être soumis à une régulation financière. Que les « traders » voient leur système de rémunération calculé et organisé de façon à ne pas pousser à la prise de risques inconsidérés, comme ce que nous avons vu. Que les règles comptables de nos banques n’accusent pas la gravité de la crise, mais au contraire permettent de l’accompagner. Que le système monétaire soit repensé entre des taux de change fixes. On a tout essayé dans le monde. Est-ce que le reste du monde peut continuer à porter les déficits de la première puissance mondiale sans avoir un mot à dire ? La réponse est clairement non. Il ne sert à rien, d’ailleurs, de désigner un coupable. Il sert simplement de trouver les voix et les moyens pour que cela ne se reproduise plus. »
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En attendant le Nouveau Bretton Woods et la refondation du capitalisme, Sarkozy évoque l’idée de la création de fonds souverains capables de défendre les intérêts nationaux et européens.
Car, dit-il, « les bourses sont à un niveau historiquement bas. Je n’aimerais pas que les citoyens européens, dans quelques mois, se réveillent en découvrant que les société européennes appartiennent à des capitaux non européens, qui auraient acheté au plus bas du cours de bourse, à vil prix, qui prendraient la propriété et les citoyens européens demanderaient alors : qu’avez-vous fait ? Moi, je demande que chacun d’entre nous, nous réfléchissions à l’opportunité qu’il pourrait y avoir à créer, nous aussi, des fonds souverains dans chacun de nos pays et peut-être que ces fonds souverains nationaux pourraient, de temps à autre, se coordonner pour apporter une réponse industrielle à la crise ? »
« J’ajoute que j’ai regardé avec beaucoup d’intérêt le plan américain pour l’industrie automobile. 25 milliards de dollars de taux d’intérêts à prix imbattable pour sauver de la faillite les trois constructeurs américains automobiles. Je voudrais que l’on s’arrête un instant sur ce sujet en Europe. Nous demandons à nos constructeurs, et nous avons raison, de construire maintenant des voitures propres, de changer complètement leur appareil de production. A ce titre, grâce au bonus écologique, désormais 50 % des voitures vendues dans mon pays sont des voitures propres. Peut-on laisser l’industrie automobile européenne en situation de distorsion grave de concurrence avec ses concurrents américains, sans poser la question de la politique sectorielle européenne pour défendre l’industrie européenne ? Cela ne veut pas dire qu’il faut remettre en cause le marché unique. Cela ne veut pas dire qu’il faut remettre en cause le principe de la concurrence. Cela ne veut pas dire qu’il faut remettre en cause le principe des aides d’Etat. Cela veut dire que l’Europe doit poser une réponse unie et une réponse qui ne doit pas être naïve, face à la concurrence des autres grandes régions du monde. Notre devoir, c’est qu’en Europe, on puisse continuer à construire des avions, des bateaux, des trains, des automobiles parce que l’Europe a besoin d’une industrie puissante. »
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