Dans Le Monde du 18 avril, Jacques Sapir, directeur d’études de l’Ecole des hautes études en sciences sociales, a proposé une intéressante initiative pour revitaliser les économies dévastées des pays appartenant autrefois à l’Union soviétique. Il appelle en effet à la création d’une « union de paiements » pour la Communauté des Etats indépendants et les pays du bassin de la mer Noire, dans le but de promouvoir le commerce et la croissance économique.
Grand expert français de la Russie, Sapir dénonce l’Ouest pour avoir contribué au pillage de l’économie russe, pour avoir applaudi à l’assaut contre le parlement russe de 1993 et soutenu la première guerre de Tchétchénie.
La dépression économique en Russie et dans d’autres Etats de la CEI, écrit Sapir, « est largement liée à l’effondrement du commerce interne, lors de la dissolution de l’URSS. Le temps et les faits ont montré que les pays concernés ne pouvaient entièrement, ni même significativement, remplacer ce commerce perdu par l’accroissement de leurs relations avec les économies de marché développées. Une compétitivité trop faible, notamment en qualité, en est la cause. (...) La contraction de ce commerce résulte largement de l’absence de systèmes adéquats de paiement. (...) Il faut favoriser les échanges entre les pays concernés par la mise en place d’une Union de paiements au sein de la CEI, inspirée de l’expérience de l’Union européenne des paiements, qui fonctionna avec un grand succès de 1948 à 1959. »
Une Union de paiements signifie trois choses :
- « C’est un système qui équivaut à rendre les monnaies des pays concernés convertibles à l’intérieur de périodes de référence. Seuls les soldes finaux sont réglés en devises ou par des lignes de crédit. »
- « C’est ensuite un système de crédit multilatéral pour développer le commerce. »
- « C’est enfin un système de coordination et de coopération entre les banques centrales pour assurer des taux de change fixes entre pays membres. »
Sapir propose que l’euro soit la monnaie de référence et que l’UE fournisse initialement 2 à 4 milliards d’euros. L’UE « affirmerait ainsi de manière tangible et efficace son soutien à la transition » dans la CEI. « La participation de l’UE à une Union de paiements (...) pourrait être vue par les autorités russes comme le moyen d’établir des liens privilégiés avec l’Europe ». Un tel projet, conclut l’auteur, « pourrait être un des axes de la présidence française de l’UE qui commencera en juillet. »