Le 15 mai 2008 (Nouvelle Solidarité) – Dans un entretien avec le quotidien Les Echos, Pascal Lamy, ancien responsable de la Rand Corporation Europe et directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), s’en prend violemment aux propositions françaises pour défendre la PAC et « l’exception agricole ».
Confronté au fait que de nombreux pays ont actuellement recours à des mesures visant à limiter voire à suspendre leurs exportations de nourriture pour survivre, Lamy, plein de compassion, n’a pas hésité à déclarer froidement qu’ « en tant qu’économiste, j’estime qu’assécher l’offre va dans le mauvais sens. En tant qu’homme politique, je comprends. Les économistes voient cela globalement ; les politiques pensent à leur prochain mandat… »
Dans une allusion à peine voilée aux déclarations de Jean Ziegler pour qui la course folle aux agro-carburants mérite le qualificatif de « crime contre l’humanité », Pascal Lamy, tout en admettant que dans certains pays, cela a « rogné sur la production agricole », affirme qu’il « est excessif de mettre tout le monde dans le même sac en disant que les biocarburants sont une catastrophe ».
Quand on lui demande ce que l’OMC « peut faire » face à la crise alimentaire, Lamy reprend le credo britannique en vantant les mérites des négociations de Doha qui permettront encore plus d’accroître le libre-échange, car elles traiteront « les obstacles qui perturbent les échanges et qui sont à l’origine des dégâts de l’agriculture des pays en voie de développement ».
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Pour cela, il faut un accord à l’OMC et rapidement. Car« on a les conditions politiques et techniques pour conclure en 2008 ». Ce que l’Europe y gagnera ? « Sur l’agriculture, les Européens vont gagner des accès aux marchés. De plus, leurs concessions ont déjà été largement réalisées lors de la réforme de la PAC. Et grâce à l’OMC, ils obtiendront une réforme du système américain qu’ils n’auront jamais autrement. »
Le journaliste des Echos demande ensuite ce qu’il pense de la suggestion faite par Michel Barnier « de sortir l’agriculture de l’OMC… »
Lamy : « Les pays en voie de développement – soit les trois quarts des membres de l’OMC – ont mis vingt ans à obtenir que l’agriculture fasse partie de l’échange international. Dans le Doha Round, ils entendent aller plus loin encore. La probabilité que cette suggestion prenne vie est donc très faible… »
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