Par Christine Bierre
Paris, le 10 mai (Nouvelle Solidarité)—Les provocations lancées contre le Hezbollah par les alliés libanais de l’administration Bush/Cheney – le gouvernement Siniora et les forces du Courant du Futur de Saad Hariri — faisaient partie d’un plan visant à démanteler la milice du Hezbollah, qui devait coïncider avec la prochaine arrivée de George Bush dans la région. La décision du gouvernement libanais d’annoncer le démantèlement du réseau de communication du Hezbollah, servant notamment aux communications entre le commandement de la milice et ses hommes, ainsi que le limogeage du responsable du secteur sécurité de l’aéroport international de Beyrouth, faisaient partie d’un plan global visant à imposer par la force la résolution 1559 de l’ONU. Bien que cette résolution adoptée en 2004 appelait au démantèlement de toutes les milices actives au Liban, une attitude conciliante avait été adoptée envers le Hezbollah, étant donné la difficulté de désarmer un mouvement d’une telle importance et le fait qu’il constitue la seule défense du pays face à Israël, l’Armée libanaise n’étant pas en mesure, à ce stade, de jouer ce rôle.
Des sources régionales bien informées, citées par Scarlett Haddad dans L’Orient-Le Jour du 10 mai, rapportent que ce n’est pas un hasard si le gouvernement Siniora a adopté ces mesures provocatrices à la veille d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU qui devait être consacrée au rapport de Terjé Roed Larsen sur la résolution 1559. On cherchait ainsi à éviter de devoir appeler à une nouvelle réunion du Conseil de sécurité pour alerter la communauté internationale et demander que la FINUL, déployée actuellement aux frontières libano-israéliennes, puisse être redéployée sur Beyrouth. Ce plan d’ensemble devait trouver son couronnement lors de l’arrivée de George Bush dans la région et de la réunion organisée par Hosni Moubarak avec Bush et Siniora à Charm El Cheikh. D’autres sources rapportent aussi que l’escalade contre le Hezbollah a démarré au retour de Saad Hariri au Liban, après un séjour de deux mois en Arabie saoudite, où le très british prince Bandar complote régulièrement contre le Liban.
Voici le projet que Hassan Nasrallah a décidé de contrer en mettant rapidement en œuvre un plan qui a pris tous ses ennemis de court. Le Hezbollah a procédé au démantèlement de tous les locaux du Courant du futur à Beyrouth-Ouest et, afin d’éviter toute accusation de putsch « chiite » sur la capitale, il a pris soin de promouvoir à leur place des dirigeants sunnites favorables au dialogue national. Notons aussi que les forces armées se sont déployées à tous les points stratégiques de la capitale sans intervenir dans les combats, sauvegardant ainsi leur traditionnelle neutralité. « Les partisans de l’opposition ont agi selon un plan bien précis," rapporte Scarlett Haddad, "pas question de procéder à des actes de vengeance et à des règlements de comptes. Lorsque la permanence est investie, les personnes qui s’y trouvent sont invitées à se retirer et sont remises aux unités de l’armée » et les locaux remis aux autorités locales. « Selon des sources proches de certains pôles de l’opposition, ceux-ci auraient même fait savoir à leurs interlocuteurs militaires et diplomatiques qu’ils avaient pour l’instant quatre lignes rouges : le domicile de Rafic Hariri, à Koraytem, où se trouverait son fils, le chef du Courant du futur, le domicile du chef du PSP Walid Joumblatt, à Clemenceau, le siège du mufti Mohammad Rachid Kabbani à Basta et le Grand Sérail où se trouverait le Premier ministre Fouad Siniora. »
Dans sa conférence de presse du 9 mai, cependant, Hassan Nasrallah a été on ne peut plus clair sur les conditions d’un retour à la normale : le gouvernement doit revenir sur les deux mesures annoncées et reprendre le dialogue national avec Nabih Berry, président du Parlement. La presse rapporte également que le Hezbollah serait prêt à mettre fin à son occupation de Beyrouth-Ouest, ainsi qu’au sit-in qui dure depuis six mois au cœur de Beyrouth, en échange du départ de Siniora. Et pour ce qui est de l’élection présidentielle, des sources proches de l’opposition considèrent que l’élection du général Sleimane à la présidence n’est plus à l’ordre du jour, sauf à présider un gouvernement de transition rapide qui n’aurait que deux tâches : élaborer une nouvelle loi électorale et appeler à de nouvelles élections. L’élection d’un véritable Président aurait lieu par la suite.
Cependant, l’économiste et démocrate états-unien Lyndon Larouche a incité les dirigeants locaux à se hisser au niveau de l’échiquier mondial, pour comprendre comment la faction de l’empire britannique qui contrôle Bush et Cheney met en oeuvre une stratégie visant à provoquer une guerre contre l’Iran ou un autre pays de la région, afin d’éviter que des mesures d’autodéfense ne soient instrumentalisées pour contribuer à ce plan de guerre.
En évitant soigneusement de mêler les quartiers chrétiens au conflit, le Hezbollah a ouvert une porte de sortie de crise au général Aoun, seul candidat ayant prouvé ses aptitudes pour le poste de Président du Liban. Plutôt que de se soumettre à la faction de l’Empire britannique, les « puissances » occidentales devraient agir 1) pour créer les conditions d’une évolution de la situation dans cette direction, 2) pour un plan de paix par le développement économique garantissant la sécurité à toute l’Asie du Sud-Ouest.