Le 17 janvier 2008 (Nouvelle Solidarité) - Dieter Spethmann et Otto Steiger, respectivement ancien PDG du géant industriel allemand Thyssen AG et professeur émérite d’économie à Brême, dans leurs conclusions d’un article de référence, affirmaient dès 2005, qu’à défaut d’une réforme en profondeur de l’Union monétaire européenne, l’Allemagne « dont l’économie souffre de l’euro, pourrait tout simplement quitter l’euro » (p. 29).
Parmi les bonnes raisons justifiant cette démarche, ils pointent du doigt les « Quatre talons d’Achille du système euro », en particulier l’absence scandaleuse de tout statut de « prêteur en dernier ressort ».
Tout d’abord, les auteurs rappellent la déconfiture des unions monétaires européennes précédentes : l’Union scandinave (regroupant le Danemark, la Norvège et la Suède), morte pendant la Première Guerre mondiale, et l’Union latine (créée en 1865 par Napoléon III entre la France, la Belgique, l’Italie et la Suisse), morte en 1927. Pourquoi ont-elles disparus ? Elles n’avaient pas de « vraie banque centrale » capable d’émettre de la monnaie et disposant de revenus fiscaux, à l’instar d’une vraie nation.
Après un ensemble de considérations assez techniques, la conclusion de l’article pose un problème politique de fond : « La violation la plus bizarre des principes d’une banque centrale dans l’architecture du système euro, reste néanmoins la simple omission du principe même de prêteur en dernier ressort. Ni le traité de Maastricht, ni le traité d’Amsterdam ou le statut du système des banques centrales européennes et de la Banque centrale européenne ne font la moindre référence à la responsabilité de prêteur en dernier ressort. »
Spethmann et Steiger estiment ensuite que la loi bancaire américaine de 1935 peut servir aujourd’hui de modèle pour transformer le rôle de la Bundesbank allemande en celui joué par la Réserve fédérale de New York, qui techniquement (selon les auteurs) joue ce rôle pour la monnaie américaine et les antennes régionales de la Fed.
« Pour combler ce manque de statut de prêteur en dernier ressort, le système euro n’a pas seulement besoin d’une BCE plus puissante ou d’une ‘Bundesbank européenne’, mais aussi d’un Trésor européen, doté du même statut que le Trésor américain agissant en accord avec la Réserve fédérale de New York. »
« Sans une réforme du système euro en faveur de plus de centralisation, disent les auteurs, « l’Union monétaire européenne sera condamnée à subir le même sort que les unions monétaires précédentes... » [C’est-à-dire l’échec].
« Evidemment, on n’est pas forcé d’attendre que l’euro se dissolve. Des pays comme l’Allemagne, dont l’économie souffre déjà de l’euro, pourrait tout simplement quitter le SME. »
Pour conforter ce départ ils citent Joachim Fels, économiste en chef de Morgan Stanley à Londres qui affirme que si le prix politique d’un tel départ serait très élevé, les aspects techniques ne sont nullement insurmontables.
Constatant qu’actuellement les billets et pièces sont de toutes façons fabriqués par les banques centrales des Etats membres, Fels estime que « si un pays désire réintroduire une monnaie nationale, il suffirait de donner force libératoire aux billets et pièces en euro en attendant l’introduction d’une nouvelle monnaie nationale. »