13 décembre 2008 (LPAC) — Au cours de la deuxième semaine de décembre, les britanniques et leurs alliés ont redoublé d’efforts pour renverser le régime du Président du Zimbabwe, Robert Mugabe. N’ayant pas réussi à le chasser du pouvoir en appuyant sans condition l’opposition anglophile dirigé par Morgan Tsvangirai et Tendai Biti, ils prennent maintenant pour prétexte l’épidémie de choléra pour réclamer à cor et à cri une intervention militaire.
Ceci dit, le dernier rapport de l’OMS sur le choléra au Zimbabwe est alarmant, faisant état de 775 morts et de plus de 16000 malades. L’épidémie risque de s’étendre aux pays voisins (Zambie, Botswana, Mozambique, Afrique du Sud). Pourtant, il est relativement facile de vaincre le choléra en mobilisant les ressources nécessaires pour fournir de l’eau propre et des installations sanitaires.
Mais la préoccupation de Londres n’est pas de sauver des vies, mais de venir à bout de Robert Mugabe. C’est ainsi que le ministre britannique des Affaires étrangères, David Miliband, a déclaré à l’issue d’une réunion avec ses homologues de l’UE : « Il y a unanimité sur le fait que, bien que l’épidémie de choléra fasse les grands titres, la véritable maladie au coeur du Zimbabwe est la mauvaise gouvernance du régime de Mugabe. »
Le Financial Times, véritable porte-voix des financiers de la City de Londres, proposait dans un éditorial de suspendre tout envoi de nourriture et de médecins, si « de telles mesures allègent les pressions sur M. Mugabe pour qu’il démissionne ». Plus direct, le Daily Telegraph, appelle le gouvernement britannique à « solliciter l’approbation de l’ONU pour renverser M. Mugabe ». Malheureusement, aussi bien Nicolas Sarkozy que Javier Solana de l’UE abondent dans le même sens. Sans parler de l’Open Society de George Soros, qui s’ingère partout où des intérêts miniers et stratégiques sont en jeu.
L’hypocrisie de ces appels est insoutenable. Pour preuve, ces mêmes puissances n’ont pas levé le petit doigt pour aider le Zimbabwe à combattre les facteurs responsables du choléra. Au contraire, elles lui imposent depuis des années des sanctions internationales, afin de punir le Zimbabwe d’avoir rejeté les conditionnalités du Fonds monétaire international (FMI). Il s’agit donc de faire du Zimbabwe un exemple. En bafouant sa souveraineté, la voie sera ouverte pour appliquer le même traitement aux autres nations africaines qui en jouissent encore.
Si le Premier ministre du Kenya, Raila Odinga, et l’ancien archevêque Desmond Tutu se sont ralliés au courant impérial en attaquant le Président zimbabwéen, les pays membres de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) ont adopté une approche différente. Leur chargé de mission pour le Zimbabwe, l’ancien Président d’Afrique du Sud, Thabo Mbeki, a élaboré un accord de partage du pouvoir pour un gouvernement d’unité nationale, approuvé par la SADC le 10 novembre.
D’ailleurs, initialement, Morgan Tsvangirai, du Mouvement pour un changement démocratique, a accepté ce nouvel accord, prévoyant une coalition constituée du Zanu-PF au pouvoir, du MDC-T et de l’opposition MDC-M. Par la suite, obéissant à ses maîtres anglais, il a renié ses engagements. Cette volte-face a inspiré à Thabo Mbeki une critique cinglante, où il accuse la direction du MDC de se préoccuper davantage d’« obtenir l’approbation de ses partisans à l’étranger », c’est-à-dire l’Angleterre et les Etats-Unis, que du sort de sa population.
Sur un ton fort peu diplomatique, l’ancien Président sud-africain martèle l’urgence de former un gouvernement capable au Zimbabwe, afin de rétablir les services essentiels pour la survie de la population et d’empêcher l’implosion du pays.
Pour creuser le sujet : Les conditions de la renaissance économique et culturelle de l’Afrique
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• 14/12/2008 - 16:51
Je reviens du Zimbabwe où j’ai vu des gens mourir... du choléra, de faim, de peur... je ne soutiens pas la politique de l’Occident en Afrique, loin de là. Mais cet article ne fait que reprendre la propagande honteuse de M. Mugabe.
Je serais curieuse de savoir si la personne qui a écrit ces lignes est déjà allée à Harare. Peut-être aurait-il une différente opinion.
# BCB
• 15/12/2008 - 11:58
Je suis dans un pays où les premiers cas de tuberculose sont réapparut (Nord pas de calais) où un colloque sur l’immigration est organisé à Vichy, "haut lieu de l’histoire de France", où on envoie des gendarmes dans des lycées pour faire des fouilles au corps, et où les financiers font passer Al Capone pour un petit ange du paradis.A-t-on vraiment des leçon à donner à des pays qui viennent d’être décolonisés, vu ce qui se passe chez nous ?
# Jean-Gabriel Mahéo
• 15/12/2008 - 12:44
Quant à moi, je ne reviens pas du Zimbabwe, et pourtant je suis bien obligé de reconnaître que la situation actuelle du Zimbabwe est la conséquence directe de la trahison par l’empire britannique des accords post-coloniaux, que Robert Mugabe a fini par imposer de force.
Lorsque le ZANU-PF reprit par la force le contrôle des terres agricoles des mains des colons à partir de 2000, après que Tony Blair ait refusé de les rapatrier et de les indemniser (selon les accords de Lancaster House, 1979), la machine infernale de l’empire colonial britannique a commencé à massacrer ce magnifique pays, de l’extérieur comme de l’intérieur, un peu comme il gérait les différentes régions indiennes au 19éme siècle : famine, chaos social, corruption, isolation, épidémies...
Le Zimbabwe est aujourd’hui isolé commercialement, ses relations avec son voisinage sont contrôlées, et ses relations avec le monde systématiquement sabotées. Ce pays est soumis de fait à une autarcie forcée, à des actes de sabotage et de terrorisme à l’intérieur et à des actes de guerre financière de la part de la communauté internationale.
L’opposition MDC appartient et est financée officiellement par l’ex-puissance coloniale, ce qui constitue partout ailleurs une haute trahison.
La Chine tend la main, bien sûr, et l’Afrique du sud a fait ce qu’elle a pu sous Thabo Mbeki pour protéger le Zimbabwe d’attaques excessives. Le combat n’est pas fini.
De quel côté est la propagande honteuse ?
Voir n’est pas savoir.
# Colbert
• 15/12/2008 - 14:52
Enfin, il faudrait que vous vous décidiez.
C’est à Londres et dans les autres capitales occidentales (incluant Paris) que sont décidées les conditionalités du FMI, et il n’y pas besoin d’aller à Harare pour savoir cela. En tout cas, moi je n’en ai pas les moyens. Vous pouvez peut-être me payer un billet pour y aller.
# James
• 08/01/2009 - 23:34
J’espère que tu es passé à Harare par hasard et que tu n’as pas dû payer un billet aller retour pour constater que les gens meurent du cholera ! Je crois que cette logique doit cesser de penser qu’on peut acheter tout un pays pour quelques comprimés. En fait, oui ! les gens n’ont qu’à creuver de toute façon ce n’est pas de notre faute ! c’est Mugabe qui ne veut pas partir. Quelle compassion. Merci à Mbeki. Cela peut ouvrir les yeux à certains présidents africains. Je suis sûr qu’il y en a qui croient qu’il suffirait que Mugabe parte pour que tout le Zimbambwe soit prospère ! quelle naïveté !
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