Jacques Cheminade, président de Solidarité et Progrès, a fait parvenir cette proposition au ministre de la Santé et des Solidarités le 21 octobre.
En ce moment même, le virus de la grippe aviaire se répand près de nos frontières orientales et septentrionales, porté par des oiseaux contaminants. Certes, la transmission de l’homme à l’homme n’est pas encore établie. Cependant, les conditions pour une contamination humaine suivie d’une humanisation du virus sont réunies.
Tout d’abord, les oiseaux migrateurs contaminent les oiseaux d’élevage, et le virus se répand parce qu’il n’existe pas de système de prévention vétérinaire efficace en Sibérie et en Chine. De plus, le risque de transmission se trouve fortement accru du fait de la pauvreté et de la situation sanitaire précaire des populations qui se trouvent sur le trajet des oiseaux.
Ensuite, chez nous, les mesures de prévention et de contrôle vétérinaire sont aujourd’hui inefficaces et les chambres d’isolement prévues dans les hôpitaux, tant en nombre qu’en qualité d’aseptisation, sont notoirement insuffisantes. Les conditions de production massive et rapide d’un vaccin, si le saut à l’homme est avéré, ne sont pas davantage réunies.
Aussi, un certain nombre de mesures d’urgence épidémiologique sont à prendre, compte-tenu du risque élevé couru et de la situation de force majeure dans laquelle nous nous trouvons :
- Vaccination systématique de tous les oiseaux d’élevage dans notre pays et incitation des autres pays européens à y procéder également de toute urgence. Le virus aviaire de l’oiseau est actuellement connu, c’est à ce stade qu’on peut intervenir.
- Etablir un système de veille sanitaire aux frontières, à l’échelle française et européenne.
- L’Etat doit dégager des crédits pour l’abattage éventuel d’oiseaux afin que les éleveurs et vétérinaires n’hésitent pas à signaler les cas suspects aux autorités.
- La population doit être responsabilisée en lui indiquant les mesures simples d’hygiène à prendre (comme ce fut le cas pour la tuberculose dans les années 50).
- Ne pas appliquer au système hospitalier des critères de rentabilité comptable et financière, mais dégager des crédits pour rénover les hôpitaux en prévoyant le nombre de lits nécessaire en cas de démarrage de l’épidémie.
- Etablir un plan de mobilisation et de coopération entre services intéressés (services d’urgence médicaux, médecine de ville, pompiers, armée, police...).
- Etablir une coopération avec les chasseurs afin que ceux-ci signalent systématiquement les cas suspects d’oiseaux malades et, en cas de multiplication de ces cas, suspendre l’exercice du droit de chasse dans notre pays.
- Ouvrir un service d’urgence pour offrir les soins nécessaires aux personnes précarisées, tant par souci moral le plus élémentaire que pour éviter la constitution éventuelle de réservoirs d’épidémie.
- Prévoir un plan pour assurer la continuité du fonctionnement, en cas d’épidémie, de tous les services nécessaires à la population : alimentation, électricité, transports...
- Etendre rapidement notre coopération avec les pays moins pourvus que le nôtre dans tous les domaines de santé publique, conformément à la tradition de générosité de notre pays, par-delà une vue comptable à court terme. L’aide à la veille sanitaire doit être étayée par le soutien financier et humain à la mise en place de services vétérinaires qualifiés et efficaces.
- La production du vaccin doit démarrer dès que le mutant sera identifié ; il faut de toute urgence préparer les conditions de ce démarrage, suivant un protocole de mobilisation. Le fait que Sanofi-Aventis soit une société française nous donne une responsabilité particulière.
Le rôle de l’Etat est d’abord de prévenir, ensuite de prévoir et, enfin, de créer les conditions pour restreindre autant que possible les effets de l’épidémie, dans l’hypothèse où elle se matérialiserait.
Face à une épidémie d’une telle ampleur, il serait désolant et criminel que nous ne soyons pas mieux préparés que les autorités américaines face aux cyclones qui ont sévi en Louisiane.