9 décembre 2008 (Nouvelle Solidarité) – C’est la question que se posent de plus en plus de journalistes et d’économistes en France et ailleurs.
Dans un article publié par Le Figaro sous le titre « L’euro survivra-t-il à la récession ? », Jean-Pierre Robin constate que la crise mondiales, immobilière, bancaire, boursière et maintenant économique, « frappe de façon asymétrique les uns et les autres. Elle conduit à exacerber les différences nationales au sein de la zone euro. »
Comme expression la plus frappante de cette hétérogénéité, Robin indique « les conditions auxquelles les Etats nationaux financent leurs dettes publiques sur les marchés de l’argent. Quant l’Allemagne émet des obligations à dix ans (Bund) à un peu moins de 3%, l’Etat français doit payer 45 points de base de plus, et pour l’Italie l’écart atteint 120 points. Autrement dit, le coût de la dette est supérieur d’environ 15% pour l’Etat français (par rapport à l’Allemagne) et de plus d’un tiers pour l’Italie. »
Les marchés (c’est-à-dire les banques), profitant de l’assouplissement récent du pacte de stabilité et de croissance, font payer le déficit « aux pays les moins vertueux ou les plus atteint par la crise ». « Cela ira-t-il jusqu’à l’éclatement de la zone euro ? » s’interroge-t-il.{}
Dans La Tribune, Martin Feldstein, un professeur d’économie d’Harvard et ancien conseiller de l’Administration Reagan aborde la même problématique :
« Le grand problème, c’est que la situation de chaque membre de l’UEM risque d’évoluer de façons si diverses que certains leaders politiques nationaux pourraient trouver plus judicieux d’adopter des politiques divergentes de celles des autres membres. Les différences actuelles entre les taux d’intérêt des obligations d’État de la zone euro montrent que les marchés financiers envisagent la rupture comme une réelle possibilité. Par exemple, les obligations d’État à dix ans en Grèce et en Irlande rapportent désormais près d’un point de pourcentage supérieur à celui d’obligations comparables en Allemagne, tandis que le taux de celles de l’Italie est presque aussi élevé.
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« Bien entendu, l’histoire compte nombre d’échecs d’unions monétaires ou d’États à monnaie unique. Si une rupture de ce type serait plus difficile pour un pays de l’UEM pour des raisons techniques et juridiques, ne doutons pas que les pays qui le veulent vraiment peuvent se retirer.
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« La raison la plus évidente de quitter l’Union serait de vouloir échapper à la politique monétaire identique pour tous imposée par la monnaie unique. Les pays dont l’économie serait en crise ces prochaines années et qui craindraient qu’elle ne devienne chronique pourraient être tentés de quitter l’UEM, afin d’assouplir leurs conditions monétaires et de dévaluer leur monnaie. Même si d’un point de vue économique cette décision n’est pas raisonnable, il n’est pas exclu que les pays confrontés à un important déclin économique en décident ainsi.
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« Le Pacte de stabilité et de croissance, qui limite les déficits budgétaires des membres de la zone euro, est une autre raison de vouloir quitter l’UEM. En cas de grave récession, certains pays pourraient opter pour une politique keynésienne traditionnelle par le biais de mesures d’incitation budgétaire à grande échelle et financées par le déficit. Bien que le Pacte de stabilité et de croissance soit suffisamment élastique pour stimuler le déficit budgétaire, il peut arriver que des pays se sentent empêchés d’agir de façon aussi agressive qu’ils l’entendent.
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« La crise financière soulève encore un autre problème : l’absence de véritable « prêteur de dernier recours ». Reste à voir dans quelle mesure la BCE sera disposée à proposer aux banques centrales et nationales le volume d’euros nécessaire pour jouer pleinement ce rôle. Si un pays voit ses banques s’écrouler parce que sa banque nationale n’a pas pu leur prêter suffisamment, il risque de quitter l’UEM pour que cette banque fournisse autant de monnaie locale qu’elle le juge nécessaire.
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« Par ailleurs, la crise économique a permis de renouveler le débat sur la nécessité de mettre en place une autorité fiscale pour l’Union européenne. Quelle que soit la logique de cette proposition, elle ouvrirait la voie à une redistribution bien plus importante des revenus– cette raison est suffisante pour que les pays à revenus élevés veuillent quitter l’Union. »
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