Le 7 avril 2008 (Nouvelle Solidarité) — Intervenant sur Europe 1 et Canal+, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin a vivement critiqué toute idée d’un retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN.
« Non seulement le retour de la France dans l’OTAN ne correspond pas aux intérêts de notre pays, mais je crois aussi que c’est dangereux », a-t-il lancé, parce que ce retour « banalisera la diplomatie française au détriment de l’indépendance dont la France jouit sur la scène internationale »
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« Je crois que non seulement le retour de la France dans l’OTAN n’est pas utile, ne correspond pas aux intérêts de la France, mais je crois aussi que c’est dangereux », a déclaré l’ancien Premier ministre sur Canal+.
« C’est prendre le risque d’être réduits à la famille occidentale, d’être perçus justement dans cette logique de confrontation que nous avons voulu éviter à travers notre engagement contre la guerre en Irak », a-t-il dit. « Ma conviction, c’est que nous perdrions des marges de manoeuvre, des marges d’indépendance. Nous perdrions ce qui fait la singularité française en matière diplomatique, c’est la possibilité de travailler avec l’ensemble de nos alliés, y compris à travers l’OTAN ».
Par ailleurs, dans France-Soir du 3 avril, l’ancien Ministre des Affaires étrangères socialiste et ancien président du Conseil constitutionnel Roland Dumas a mis en garde les Français contre « l’alignement » de la France sur Washington, en disant que « la responsabilité du gouvernement sera immense devant l’Histoire ».
Pour Dumas, « c’est un changement cardinal de la politique étrangère française depuis le général de Gaulle. Tous les présidents successifs avaient veillé jusqu’à présent à ne pas modifier notre politique. Ainsi, durant la guerre du Golfe, j’ai assisté à des entretiens entre François Mitterrand et George Bush père, où le président avait insisté sur la nécessité pour la France de garder son autonomie. C’est lui-même qui a donné l’ordre aux soldats français d’attaquer au Koweït. Cela ne sera plus possible. C’est la mort du gaullisme. »
Car, « si, comme on l’annonce, la France va rejoindre le commandement intégré de l’OTAN, elle va perdre son autonomie d’action, à l’image de la Grande-Bretagne. Elle sera un partenaire de l’Alliance, assignée à telle ou telle mission, et elle devra s’y plier. Sa voix n’existera plus. Ce que la France a fait en 2003, lors du déclenchement de la guerre en Irak, ne sera plus possible. En vertu des accords, elle n’aura plus la faculté d’adopter une autre position que celle de l’alignement. »
Roland Dumas indique que « durant le débat à l’Assemblée, aucune réponse n’a été donnée aux questions essentielles : combien de renforts [pour l’Afghanistan] ? Quelle mission : organiser la circulation des routes ou participer aux combats dans les montagnes ? Et surtout : quels objectifs ? »
Il rajoute que la France peut devenir rapidement la cible d’attentats terroristes : « C’est la question que l’on doit se poser. Nous avons réussi jusqu’à présent à ne pas être mêlés au terrorisme qui a touché la Grande-Bretagne ou l’Espagne. En allant jouer les gendarmes dans cette région tourmentée, difficile, le risque est très grand de devenir la cible des attentats. »
Pour conclure, Roland Dumas en appelle à la mobilisation des citoyens français qu’il cherche à alerter : « Qu’ils sollicitent leurs parlementaires, qu’ils fassent pression sur eux et leur demandent pourquoi nous envoyons des renforts. Il faut que le débat public s’ouvre sur ce sujet grave. »